Glossaire de l'occupation israélienne
par Paul de Rooij - traduction Pilar Pinillos


Le langage est un outil aussi puissant que trompeur. On peut aussi bien l'utiliser pour transmettre ses souffrances que pour cacher des actes désagréables et sordides. À l'heure actuelle, nulle part ailleurs qu'en Israël et en Palestine les mots sont-ils aussi corrompus à des fins politiques. Ce n'est un secret pour personne: Israël a à son service une légion de propagandistes bien rémunérés et peut compter sur des membres autoproclamés de la presse – des apologistes bénévoles – pour remplir la même mission. Ce sont principalement ces propagandistes pro-Israéliens, dont la force militaire est inégalement supérieure, qui possèdent les moyens de contrôler et de modifier le langage. Ce langage leur sert à obscurcir et à disculper les actions commises par Israël contre une population pratiquement sans défense, à perpétuer les injustices et à faire durer l'occupation et le vol des terres palestiniennes.
Pour comprendre la situation et se frayer un chemin dans cette terminologie pour le moins brumeuse, une petite partie des expressions de l'après-Oslo, employées de manière abusive par les médias, sont traduites ci-après.
Toutefois, le présent glossaire a quelques limitations, dans la mesure où les termes utilisés de manière abusive le sont généralement dans des discours basés sur les opinions israéliennes. Israël ne veut pas parler des actes qu'il commet contre les Palestiniens, d'où sa tendance à EVITER les mots qui les décrivent. Il n'est pas dans son intérêt d'utiliser, et encore moins de créer, des expressions pour dépeindre les conditions de vie des Palestiniens. De même, les médias, qui privilégient le point de vue d’Israël, ne disposent pas du vocabulaire approprié pour raconter la situation des Palestiniens. C’est pour cette raison qu'il n'est pas satisfaisant de définir des termes dans un glossaire. Le nôtre se limite à jeter un regard sur les problèmes flagrants, sur les exemples pour lesquels il existe des termes descriptifs.

Expressions employées de manière abusive par les médias



Administrative detention: Détention administrative
Emprisonnement effectué sans chef d'accusation, sans procès, parfois même sans représentation en justice, durant une période indéterminée. Les individus sont généralement enfermés dans des prisons, voire dans un camp de concentration situé dans le désert du Néguev.

Bilateral negotiations: Négociations bilatérales
Confiscation de terres. Israël confisque/vole des terres et, pour légaliser ses revendications, s'engage dans des "négociations bilatérales". Aucune négociation bilatérale n'a été entamée pour répondre aux revendications de Palestiniens sur des terres sises en deçà de la Ligne Verte.

Bypass road network: Réseau de routes de contournement
Routes exclusivement réservées aux Israéliens. Elles servent actuellement à morceler la Cisjordanie et la Bande de Gaza et représentent une expression bien tangible de la politique consistant à "diviser pour mieux régner". Toutes les propriétés appartenant à des Palestiniens et s'étendant sur un rayon arbitrairement défini autour de la route sont rasées, tous les arbres arrachés. Par contournement (bypass), on sous-entend que ces routes permettent d'éviter les villages palestiniens.

Caught in crossfire: Pris entre deux feux

Massacres délibérés.

Check-points: Points de contrôle/surveillance
Il s'agit plutôt de "choke points", littéralement des contrôles établis par l'armée israélienne pour étrangler l'activité économique palestinienne, en fermant les routes et en empêchant tout Palestinien de passer sans avoir été soumis à de longues fouilles humiliantes et souvent inutiles. Il existe environ 120 check-points en Cisjordanie et 25 dans la Bande de Gaza.

Clashes: Heurts, affrontements Lutte inégale.
Le mot "clashes” suppose l'affrontement entre deux forces égales, mais il s'avère que l'armée israélienne est l'une de plus puissantes au monde.

Closed military area: Zone militaire fermée
Démarcation mise en place afin d'empêcher les journalistes et les observateurs d'être témoins des pillages commis par l'armée d'occupation.

Closure: Bouclage Siège et couvre-feu.
Le couvre-feu est imposé pendant des semaines, ce qui empêche tous les civils innocents de mener une vie normale.

Cycle of violence: Cycle de violence
Violence disproportionnée.
"Cela suggère, au mieux, deux parties égales, mais pas le fait que les Palestiniens résistent, par la violence, à une oppression violente." John Pilger, New Statesman, 1er juillet 2002.
"Oui, il existe un cycle et la violence est disproportionnée, mais ce qui manque, c'est le contexte. Pourquoi cette violence existe-t-elle? La réponse standard – lorsque réponse il y a (ce qui est rarement le cas) – est qu'il existe une 'haine' de part et d'autre. Or, étant donné que les Israéliens sont comme nous (ils aiment s'amuser et adorent leurs enfants) et que nous ne nous considérons pas nous-mêmes comme étant emplis de haine, alors ce sont forcément les autres, les Arabes, qui sont haineux. Ajoutez à cela les persécutions subies par les Juifs au cours de l'Histoire et voilà: le résultat est un cycle de violence fondé sur la haine des Arabes envers les Juifs. De là, on arrive à la ligne de propagande israélienne." – Nabeel Abraham.

Democracy: Démocratie
Ethnocratie chauviniste. Durant les années de l'Apartheid en Afrique du Sud, les Blancs aussi se sont vantés de leur démocratie – et leur roublardise leur a valu d'être ridiculisés, à juste titre. Israël n'est pas très différent: son système politique ne peut être ni loué ni qualifié de "démocratique", en raison de l'oppression systématique qu'il exerce sur d'autres. La démocratie est une notion inclusive, alors que le système politique israélien exclut une grande partie de la population. Israël est le seul pays à faire une distinction entre citoyenneté et nationalité. C'est ainsi que des Palestiniens habitant en Israël ont la citoyenneté israélienne et la nationalité "arabe". La démocratie s'applique aux ressortissants juifs et non pas aux citoyens de l'État. Certains Arabes sont des membres de la Knesset, mais leurs droits sont restreints dans l'État juif. Les Palestiniens qui habitent dans les territoires occupés n'ont aucun droit démocratique, bien qu'ils soient obligés de payer certains impôts à Israël – un cas de taxation sans représentations.

Demographic factors: Facteurs démographiques
"Jargon israélien destiné à empêcher les Arabes de surpasser en nombre les Juifs israéliens." – Nabeel Abraham

Deportation: Déportation
Expulsion ou exil.
La définition du terme "déportation" dans le dictionnaire est la suivante: bannissement d'une personne indésirable vers son pays d'origine. Étant donné que les Palestiniens sont originaires des territoires occupés, et donc des résidents légaux, leur expulsion est un exil imposé. En outre, ce terme suppose que les Israéliens ne font que respecter la procédure judiciaire. Or, la nature douteuse des processus d'appel et les démolitions, en parallèle, des maisons des victimes violent les Conventions de Genève.

Disproportionate response: Réponse/réaction disproportionnée
Avertissement maximal proféré par le Gouvernement des États-Unis d'Amérique en réponse aux bombardements ou assassinats israéliens. Implicitement, une réponse/réaction "proportionnée" – tuer moins de personnes – serait acceptable. La médiatisation des actes habituellement commis par Israël complique tout. Les réponses/réactions "proportionnées", elles, sont ignorées.

Disputed territories: Territoires disputés
Territoires occupés.
Assez curieusement, cette expression a été inventée par les États-Unis sous l'Administration Clinton. Le langage est un reflet des préférences politiques et de la nature des "médiateurs" américains (voir honest broker: intermédiaire impartial)

Facts on the ground: Faits permanents irréversibles
Colonies.
Au mieux, elles sont considérées comme monnaie d'échange. Au pire, elles sont considérées comme étant immuables.

Final status negotiation: Négociation sur le statut final
Chimère.
Le cadre des Accords d'Oslo stipulait des négociations ayant trait à des questions de fond et aux points les plus importants permettant de résoudre le conflit. À noter que ces négociations ont toujours porté sur l'avenir. Les négociations actuelles concernent essentiellement des questions revêtant un intérêt pour Israël, telles que la sécurité, la confiscation d'autres terres… (voir bypass road network: réseau de routes de contournement).

Generous offer: Proposition généreuse
Demande de reddition.
Tout ce que les Israéliens proposent est généreux et devrait être accepté. La "proposition généreuse” de Camp David II portait sur l'offre d'une fraction de la Cisjordanie et de Gaza, la fin du contrôle sur les frontières, un recul limité des colonies et l'absence de souveraineté pour la Palestine. Et pourtant, il fallait considérer cela comme généreux. Dans le cadre de négociations de bonne foi, les parties ont le droit de rejeter une proposition sans avoir à subir des remontrances.

Green Zones: Zones vertes
Dehors, les Palestiniens.
"Secteurs, dans les quartiers d'habitation arabes, occupés par les Israéliens et situés à l'intérieur de territoires prétendument protégés pour des raisons environnementales. Un tour de passe-passe pour empêcher le développement des Arabes." – Nabeel Abraham

Hamas
Groupe d'opposition fourre-tout.
Il s'agit d'un groupe d'opposition islamique encouragé par les services secrets israéliens au cours de la première Intifada. Son but était d'ébranler le soutien à l'OLP. Depuis, c'est devenu une force d'opposition efficace contestant le "reniement de principes" d'Arafat. Tout individu proférant des critiques à l'encontre du "processus de paix" est automatiquement libellé comme défenseur du Hamas. Plusieurs intellectuels de renom, qui s'étaient élevés contre la mauvaise gestion des négociations dont fit preuve Arafat, se sont vu décerner le label "Hamas" aussi bien par les Israéliens que par "l'Autorité" palestinienne.

Held in detention: Détenu(s)
Otages.

Pratique devenue courante durant la première Intifada, par laquelle les forces d'occupation israéliennes emprisonnent les membres de la famille des personnes recherchées. Plusieurs otages libanais ont moisi en prison sans qu'il y ait eu inculpation, procès ni même la perspective d'être libérés. Shaykh Ubayd est ainsi resté en détention pendant plus de 13 ans. Ces otages demeurent en prison, bien que l'occupation israélienne du Liban Sud soit partiellement finie.

Honest broker: Intermédiaire impartial
Les États-Unis d'Amérique.
Pays qui fournit à Israël la plupart de ses armes et qui lui octroie chaque année des aides économiques sans conditions s'élevant à plusieurs milliards de dollars, sans parler des remises de prêts.

Incursion: Incursion

Attaque.
"Euphémisme le plus récent, le mot 'incursion' provient du vocabulaire de mensonges inventé pendant la guerre du Vietnam. Il signifie 'agresser des êtres humains avec des chars d'assaut et des avions'". John Pilger, New Statesman, 1er juillet 2002.

Instilling hatred: Instillant de la haine
Informations et éducation palestiniennes.

Description, à l'intention de sa propre population, des conséquences de l'occupation. Le terme "instillant de la haine" est ainsi utilisé pour décrire toute information ou nouvelle palestinienne et justifie le bombardement des chaînes de télévision et des stations de radio palestiniennes, voire des individus associés à certaines écoles. Il sert également à justifier le retrait des accréditations de tous les journalistes palestiniens. Pour les Israéliens, il est exaspérant d'être traités d'assassins, de voleurs et d'occupants. Les Palestiniens, eux, ne sont pas autorisés à faire part aux autres de leurs expériences. Être palestinien est un crime – tout comme les opinions des Palestiniens.

Israeli Defense Forces, IDF: Forces israéliennes de défense,
IDF Forces d'occupation.
Les sigles I "D" F confèrent une certaine légitimité à des forces qui sont en réalité une armée d'occupation équipée. Le respect qu'impose ce nom est donc mal placé.

Israeli-side, the "Israeli side"
: Partie israélienne

"Euphémisme contemporain pour désigner les forces d'occupation." Azmi Bishara, 25 juillet 2002, Al Ahram.
Curieuse adoption d'un euphémisme, à la fois par les Israéliens et par "l'Autorité" palestinienne.

Leverage: Moyens de négociation
Offres que l'on ne peut pas refuser.
"Essentiellement, Israël a dans son jeu la plupart des "cartes" et il est prêt à prendre en otage la population, en contraignant les dirigeants palestiniens à accéder à des exigences de plus en plus lourdes." – Dr. Majed Nassar.
Désir qu'ont les Israéliens de décider du résultat des négociations, sur la base de l'équilibre des forces plutôt que d'un équilibre juridique.

Man of Peace: Homme de paix

Criminel de guerre.

Militants: Militants
La résistance.
Les médias occidentaux ne peuvent pas décrire la résistance palestinienne comme étant militaire car, pour des raisons évidentes, ce qualificatif ne peut pas lui être appliqué. Dès lors, ils utilisent le mot "militants", ce qui donne l'impression qu'il s'agit de gangs armés et justifie d'autant plus facilement les assassinats commis par Israël (voir targeted killings: massacres ciblés).

Moderate physical pressure: Pression physique modérée
Torture.
Israël est le seul pays au monde où la torture est légale et utilisée de manière systématique.

Natural growth: Croissance naturelle
Expansion subventionnée des colonies.
Argument justifiant l'expansion continuelle des colonies. Chaque fois qu'il est demandé à Israël d'arrêter la construction de colonies dans les territoires occupés, la réponse est que l'expansion des colonies déjà existantes doit continuer afin de parer à la "croissance naturelle", c'est-à-dire au courant d'immigrés colonialistes subventionné par l'État d'Israël. Dans de nombreuses colonies, un grand pourcentage des logements est vide, ce qui remet en question la nécessité d'une nouvelle expansion.

Neighbor practice: Pratiques de voisinage
Boucliers humains.
"L'utilisation d'habitants comme "boucliers humains" est un crime de guerre. Cela a été confirmé en direct à la télévision par un officier supérieur de réserve, ancien président de la Haute Cour militaire. La Quatrième Convention de Genève interdit expressément l'utilisation de "personnes protégées" (c'est ainsi que la Convention qualifie les habitants d'un territoire occupé) à de telles fins. Cette pratique, de même que celle qui consiste à contraindre des voisins palestiniens à parcourir un immeuble suspecté d'avoir été piégé, est similaire au meurtre d'otages en représailles à des actes de résistance. […] Il est apparu qu'il s'agissait d'une méthode largement utilisée, qui avait même reçu une appellation militaire usuelle: "pratiques de voisinage". Il n'y a pas si longtemps, l'armée a promis à la Cour Suprême d'abandonner cette pratique, sans avoir la moindre intention de remplir sa promesse." – Uri Avnery, Palestine Chronicle, 19 août 2002.
[Traduction française de cet article:
http://www.solidarite-palestine.org/mpi097.html].

Neighborhood: Quartier
Colonie.
Les Israéliens et ceux qui justifient leurs actions s'obstinent à dire que Gilo n'est rien d'autre qu'un quartier de Jérusalem. En réalité, il a été construit sur des terrains occupés et confisqués de manière illégale – ce qui en fait une colonie.

No building permit: Absence de permis de construire
Ordre de détruire.
Excuse justifiant la démolition de maisons palestiniennes. Lorsque des Israéliens construisent sans avoir obtenu au préalable le permis nécessaire, l'administration leur en octroie un avec effet rétroactif et leurs bâtiments sont épargnés. Ainsi, aucune maison appartenant à un Israélien n'a jamais été détruite parce que son propriétaire n'avait pas le permis requis. En règle générale, les Palestiniens ne se voient accorder aucun permis de construire.

Operation X: Opération X
Autre exemple d'attaque.
Des noms sont donnés aux opérations militaires afin de faire passer plus facilement la pilule – il s'agit d'une astuce de marketing militaire. Le moins que l'on puisse dire au sujet de tout journaliste qui se réfère à une attaque contre des camps de réfugiés en l'appelant par le nom de l'opération en question, c'est qu'il ne cherche pas à être objectif.

Peace process: Processus de paix
[À noter que lorsque M. Ariel Sharon prononce ces deux mots en anglais, l'effet phonétique se rapproche davantage de "piss process": "processus de pisse". M. Sharon fait rarement allusion au mot "paix" en tant que résultat. Il se dit toujours favorable au processus de paix, mais n'est pas favorable à la paix.]
Ruse destinée à calmer l'opinion publique mondiale.
Processus continuel dépourvu de toute intention d'aboutir à une conclusion. Moyen qu'ont les Israéliens de gagner du temps et d'entériner leur mainmise sur les territoires occupés en développant les "faits permanents irréversibles", à savoir les colonies. De leur point de vue, plus les négociations menant à un marchandage sans fin seront longues, meilleur sera le résultat. De temps à autre, lorsque les négociations vont bon train, il se peut qu'une légère perturbation bien opportune soit la bienvenue – par exemple, les Israéliens convoquent des élections et voilà: on recommence tout depuis le début!

Pending investigation: Enquête en cours/en suspens
Affaire close.
Sur les 25 enquêtes ouvertes par l'armée israélienne au cours des 22 derniers mois, six ont été closes sans résultat et d'autres doivent encore être achevées.
"L'armée [israélienne] n'ouvre que très rarement des enquêtes pour des cas de massacres illégaux", affirme Lior Yavne, porte parole de Btselem's.
"Au fond, l'armée [israélienne] mène une politique d'impunité. Les soldats se rendent compte qu'ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent sans jamais avoir à affronter quelque problème que ce soit." – Marie Colvin, "Cruel death of a West Bank local hero" (Mort cruelle d'un héros de la Cisjordanie), Sunday Times, 21 juillet 2002.

Period of calm: Période de calme
Les Israéliens ne sont pas touchés, alors peu importent les Palestiniens.
"[…] il existe une tendance très répandue dans les médias américains à ignorer ou à minimiser la violence lorsque ses victimes sont des Palestiniens, tout en concentrant l'attention sur les incidents dont les victimes sont israéliennes." – Michael Brown et Ali Abunimah, "Killings Of Dozens Once Again Called Period Of Calm By US Media" (Les massacres de dizaines de personnes, encore une fois qualifiés de "période de calme" par les médias américains), Electronic Intifada, 20 septembre 2002.

Phased withdrawal: Retrait progressif
Départ réticent des forces d'occupation israéliennes portant uniquement sur les zones qu'elles déterminent, selon le calendrier qu'elles fixent et seulement à condition d'avoir obtenu des garanties que la population locale continuera d'être contrôlée comme elles l'entendent. Seules les zones où l'occupation revient trop chère font l'objet d'un retrait; les colonies, elles, ne sont jamais démantelées

Proof of residency: Preuve de résidence
Confiscation de la carte d'identité.
On demande fréquemment aux Palestiniens résidant à Jérusalem de montrer leur carte d'identité afin de prouver leur droit de résidence. Souvent, la police confisque leurs papiers, ce qui fait que ces personnes sont privées de leur droit de résidence et les familles touchées se retrouvent divisées et déchues de leurs maisons. Les victimes de cette politique bureaucratique de "transfert" se chiffrent par milliers. La plupart du temps, elles n'obtiennent pas de nouveaux papiers d'identité; elles ne peuvent pas prouver leur droit de résidence, puisque leurs papiers ont été confisqués, et les photocopies des cartes d'identité ne sont pas considérées comme une preuve valable pour pouvoir renouveler ces documents.

Reform process: Processus de réforme
Sélection de satrapes.
Changement politique permettant aux collaborateurs d'être à la hauteur de ce que les Israéliens et les Américains leur demandent. Tout politicien souscrivant à ce processus de réforme doit consentir à opprimer son propre peuple afin de se conformer aux demandes israélo-américaines. Arafat y avait souscrit, mais il n'a pas pu tenir ses promesses.

Refuseniks: Refuzniks Semi-refuzniks.
Soldats israéliens qui refusent de servir dans les territoires occupés, mais qui continuent toutefois dans l’armée afin de recevoir les avantages discriminatoires auxquels ont droit "ceux qui servent dans l’armée". Mot-code des Juifs israéliens.
Imaginez un soldat américain qui, pendant la guerre du Vietnam, aurait manifesté son intention de ne pas aller dans ce pays, mais qui aurait quand même accepté de rester dans l’armée afin de conserver toute sorte d'avantages – c'est ce qui s'appelle de l’hypocrisie.
Il existe une question essentielle pour les semi-refuzniks: Si, demain, un groupe de Palestiniens de nationalité israélienne cherchait à reprendre possession des villages dont ils sont originaires, quelle position adopteraient-ils? Manifesteraient-ils pour défendre les droits de ces malheureux ou marcheraient-ils sur leurs cadavres?

Removing cover: Suppression d'abris
Prétexte pour raser des maisons, défricher des champs agricoles, arracher des arbres et ainsi de suite. Transformation des terres de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza en paysages lunaires.

Restraint: Entrave(s)
Agression plus gentille/plus délicate.
"Bien qu'il s'agisse de la dernière manipulation militaire israélienne, pour les Palestiniens, la réalité est que toute "entrave" de la part de l'armée israélienne suffit à gâcher leurs vies. Il se peut que l'armée ne détruise plus de vastes zones des villes palestiniennes, mais elle continue à terrifier les civils palestiniens avec ses fusillades systématiques. L'armée envoie encore ses blindés et ses troupes faire des incursions dans les villes palestiniennes. Ces incursions peuvent durer plusieurs jours, comme ce fut le cas à Jénine la semaine dernière, où juste une nuit, comme cela est arrivé par deux fois dans la partie Nord de la Bande de Gaza. Les couvre-feux sont décrétés et levés n'importe quand et sans communication préalable, ce qui rend la vie des Palestiniens imprévisible et humiliante." – Jonathan Steele, The Guardian, 9 août 2002.

Retaliation, or Israelis never initiate violence, they always respond: Représailles, ou "les Israéliens ne sont jamais à l'origine de la violence, ils ne font que répondre à celle-ci"
Terrorisme d'État ou violence systématique.
Les faits qualifiés de "représailles" sont en réalité des punitions collectives qui: (1) visent des cibles n'ayant aucun lien avec le premier fait violent et (2) sont totalement disproportionnées par rapport à ce premier fait. Ces faits, commis de part et d'autre, contreviennent aux Conventions de Genève. À plusieurs reprises, Israël a violé des accords de cessez-le-feu en commettant des assassinats ou des actions délibérément destinées à aggraver la situation.

Right of return: Droit de retour
Je fais venir mon peuple pour déplacer le vôtre.
"Nous considérons comme contraire à la morale que ce droit juridique nous soit accordé, alors que le peuple qui devrait avoir le plus le droit à un authentique "retour", car il a été contraint à fuir par la force ou par la terreur, en est exclu." – Lettre écrite par des Juifs britanniques renonçant à leur "droit de retour", The Guardian, 8 août 2002.
Le "droit au retour" exige de la détermination pour chasser la population indigène – tout est fait au nom de la création d'un Lebensraum (espace vital) :
Le concept géopolitique de Lebensraum (espace vital) était un slogan politique populaire pendant la création de l’Allemagne unifiée en 1871. À cette époque, Lebensraum signifiait "vouloir trouver un espace vital additionnel en ajoutant des colonies", selon les exemples des empires anglais et français. Ce concept fut traité et développé pendant les décennies suivantes par les érudits Karl Haushofer, Sir Halford Mackinder et Friedrich Ratzel. En 1926, le livre de Hans Grimm Volk ohne Raum (Un peuple sans espace) fut publié. Ce livre est vite devenu un classique dans son genre et son titre un slogan populaire pour les national-socialistes. Hitler modifia le concept de Lebensraum. Plutôt que de créer des colonies pour agrandir l’Allemagne, Hitler voulait élargir l’Allemagne à l’intérieur de l’Europe et son regard était tourné vers l’Est. Dans l’idéologie nazie, Lebensraum signifiait "expansion de l’Allemagne vers l’Est avec recherche d’unité du peuple allemand et de la terre" (le concept nazi de sang et terre). La théorie nazie de Lebensraum modifiée est devenue la politique des affaires étrangères de l’Allemagne pendant le troisième Reich.

Rocks: Rochers
Cailloux.
Les Palestiniens jettent des cailloux sur les soldats israéliens armés de chars d'assaut et de véhicules blindés – c'est un symbole de défi et de résistance.

Security: Sécurité
La sécurité des Israéliens.
Exigence faite aux Palestiniens de ne pas attaquer les occupants et de ne pas répandre la violence en Israël même. Par "sécurité", les Israéliens sous-entendent toujours leur propre sûreté, sans jamais tenir compte des préoccupations des Palestiniens.

Settlements: Colonies
Les terres volées.
Villages de garnison exclusivement réservés aux Juifs et construits sur des terres confisquées aux Palestiniens par la violence. Le but des colonies est de revendiquer un droit permanent sur les terres, en évitant ainsi la création d'un État palestinien. Ces villages de garnison apparaissent toujours sur les cartes israéliennes, tandis que les villages palestiniens, dont les terres ont été confisquées pour bâtir ces colonies, n'y figurent plus.
Il y a 190 colonies en Cisjordanie et 19 dans la Bande de Gaza.

Strongholds, nests of terror: Bastions, nids de terreur
Camps de réfugiés, foyers pour des centaines de milliers de Palestiniens, pour la plupart des réfugiés des villages conquis par les Israéliens.

Suspicion: Soupçons
Motifs d'emprisonnement ou d'assassinat, "sans parler des milliers de "suspects" ramassés par les soldats israéliens et qui sont toujours en prison" – Edward Said, Punishment by Detail (Punition au détail), 8 août 2002 (voir administrative detention: détention administrative).

Targeted killings: Massacres ciblés
Assassinats dans le cadre desquels un commandant militaire joue les rôles de juge, de jury et de bourreau. Ces massacres figurent sur la liste des crimes de guerre reconnus dans les Conventions de Genève, en vertu desquelles l'occupant a un devoir envers ses prisonniers.
"Personne ne se pose la question de savoir si toutes les victimes tuées étaient vraiment des terroristes ou s'il a été prouvé qu'elles étaient des terroristes ou si elles étaient sur le point de devenir des terroristes." – Edward Said, Punishment by Detail (Punition au détail), 8 août 2002.

Tear Gas : Gaz lacrymogène
Euphémisme pour "gaz toxique". Malgré les avertissements clairement imprimés sur les bombes lacrymogènes, qui indiquent que le gaz ne doit pas être utilisé dans des zones exiguës, c'est précisément dans ce genre d'endroits que le gaz est dispersé. Les forces d’occupation imposent des couvre-feux et aspergent des quartiers entiers de gaz lacrymogène.
Le personnel médical a demandé à plusieurs reprises la liste des agents actifs contenus dans ces gaz. Jusqu'à présent, ni le fabricant (Federal Laboratories of Pensylvania) ni les autorités israéliennes n’ont répondu à cette requête. Leur seule réaction a été de supprimer l’avertissement ainsi que le logo des Federal Laboratories.
Un nouveau gaz de couleur brune est apparu sur le "marché"; l'exposition à ce gaz provoque des vomissements.
"Je n’hésiterais pas à déclarer que la pulvérisation aérienne de CS* – qui est un acte totalement impossible à maîtriser –, suivie de l’imposition d’un couvre-feu, devrait être considérée comme un crime de guerre." – Prof. Israel Shahak, AIC, 5 janvier 1991.
[* Othochlorobenzal malononitrile, agent chimique lacrymogène utilisé à des fins belliqueuses (N. d. T.)]

Terrorism: Terrorisme
Violence au détail, résistance. Une population opprimée a le droit de résister et d'avoir recours à la violence lorsqu'elle n'a pas d'autre choix. Dans le cas des Palestiniens, cette violence est qualifiée de "terrorisme" et considérée comme illégitime, alors que la violence dont use Israël est toujours perçue comme justifiée. (voir retaliation: représailles)

Town planning: Planification des villes
"Euphémisme utilisé pour caractériser le remplacement des Arabes par des Juifs et qui fait penser à certaines habitudes de "planification urbaine" aux États-Unis." – Noam Chomsky, in The New Intifada (La nouvelle Intifada).

Transfer: Transfert
Euphémisme obscène pour "nettoyage ethnique" (qui, en soi, est déjà un euphémisme).

Unconfirmed reports: Rapports non confirmés
Récits des ravages causés par l'armée israélienne. Les rapports sont confirmés uniquement lorsque les Israéliens disent qu'ils le sont ou lorsque des journalistes "occidentaux" les rapportent. Aucun récit d'événements fait par des Palestiniens n'est jamais pris en compte pour étayer un rapport. Au mieux, on lui attribue le qualificatif "présumé".




Paul de Rooij est économiste et habite à Londres.

 

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