rapport de la 17e
mission civile
organisée par le Collectif
Urgence Palestine
octobre 2005
Photos: © Nicolas Bezençon
Nous venions d’entrer à Gaza et en quelques
minutes, sans avoir le temps de nous préparer, nous
sommes à Beit Hanun. Cette zone industrielle a été
entièrement détruite avant le départ
des israéliens.
La Central électrique a été complètement
détruite, les ateliers, les hangars mis à feu
ou démolis. C’est la désolation. 4'700
ouvriers travaillaient dans ce site.
Je me demande, en voyant ces fers tordus par la bêtise
humaine, comment il est possible de penser qu’Israël
veut la paix. Je constate qu’Israël
veut seulement laisser les Palestiniens sans issue.
Nous pouvons observer, sur le trajet pour arriver à
la colonie de Nisanit, les poteaux de transmission électrique
dépourvus de fils, arrachés avant le départ
israélien. La
colonie de Nisanit est aussi un tas de gravas, de canalisations
et d’égouts détruits, d’écoles
démolies où dans un morceau de mur nous pouvons
entrevoir un ancien dessin d’enfant. Un
véritable gâchis. L’unique bâtiment
sur pied est la synagogue. Les colons ont fait appel à
la Haute Cour israélienne pour laisser les synagogues.
Malgré l’avis contraire de la Cour qui a estimé
qu’une fois la torah enlevée, le lieu ne préserve
plus son caractère sacré, les synagogues ont
pourtant été laissées, comme une provocation
aux Palestiniens. Cela montre les limites d’obéissance
aux autorités israéliennes des colons et de
l’armée.
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Photos:
© Nicolas Bezençon
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Ce même panorama de destruction nous les trouvons
dans les autres colonies visités : Gush Katif, Neve
Dekalim, Kfar Darom.
A Gush Katif, on découvre un complexe de serres important
qui avait été construit en 1990. Les serres
sont en bon état, mais le système d’arrosage
au goutte à goutte ainsi que les installations électriques
ont été détruites.
Autour des serres de Gush Katif, en espérant qu’elles
soient remises en état, déambulent des paysans
et des jeunes dans l’espoir d’un travail futur.
Ce tas de pierre ne m’impressionne pas, ce que m’impressionne
c’est qu’il y a des hommes capables d’humilier
un peuple, de le voler au nom d’être le peuple
élu par Dieu. Je me demande,
pourquoi la communauté internationale, les citoyens
du monde, ne se révoltent pas face cet état
de fait.
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A Deir El Balah, Al Maghazi, Morag, Khan Younes, Rafah, nous
pouvons observer des maisons détruites pour déloger
ses occupants ; des maisons marquées par des tirs mais
qui restées debout et ont permis à l’armée
de s’installer à moindre coût. On voit
aussi des grandes étendues de terres blessées
par des bulldozers afin de créer des zones de protection
pour les colonies et les réseaux routiers des colons
et de l’armée. Ces no
man’s land de sécurité ont bouffé
de grandes espaces de terres aux paysans. C’est
des citronniers, des orangers, de potagers, des serres qui
ont été détruits.
Ces terres blessées par le vide, parsemées
de trous et de dénivellations, provoquent en nous un
fort sentiment de désolation face au désastre
écologique. Un paysage d’une
guerre unilatérale, un territoire dans lequel la pitié
a été oubliée.
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> destructions
en 2002
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Nous
avons visité un village de pêcheurs à
Al Mawasi. Région qui a été complètement
isolée pendant 5 ans. Cela faisait à peine deux
jours que les pêcheurs avaient reçu l’autorisation
de pêcher et dans une limite d’environ 10 km de
la côte. Théoriquement le permis est de 36 km,
mais dans les faits l’autorisation est plus limitée.
Avant la 2eIntifada l’activité de
pêche était réduite au minimum, obligés
par les difficultés des autorisations, par d’autres
limitations légales, les taxes, etc.
Depuis la 2e intifada
Israël avait interdit la pêche dans ce village.
L’armée est venue et a confisqué les moteurs.
Ils ont plongé le village dans le désarroi.
Ils n’avaient plus de revenus. Ils ont dû emprunter
pour survivre. Il y a 600 pêcheurs, environ 10 membres
par famille. Tous dépendent
de la pêche. La flotte capable d’aller
pêcher est actuellement composée de 50 bateaux
soit environ 20 % de la flotte. Les bateaux se sont détériorés
par manque d’entretien et d’activité durant
5 ans. Le manque à gagner par année peut s’évaluer
à U$ 1'500'000.
Pendant la 2e intifada, ce village Palestinien
au bord de la mer a été partiellement détruit.
Un seul colon est venu s’installer, créant un
périmètre de sécurité autour.
Ainsi l’atelier de réparation des bateaux a été
détruit. Certains pêcheurs ont perdu 2 bateaux
restant sans aucun moyen de subsistance. Ils ont besoin d’investissements
pour démarrer l’activité, mais pour le
moment l’autorité palestinienne ne fait rien
en leur faveur.
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> voir situation
des pêcheurs en 2002
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Dans le camp de réfugiés de Rafah, la population,
qui habitait aux abords de la frontière égyptienne,
a souffert le calvaire. L’armée, pour élargir
la zone de séparation entre la frontière et
la zone d’habitation palestinienne, a effectué
de constantes incursions. La
population quittait ses maisons pendant la nuit pour y revenir
le matin. Mais l’armée à chaque incursion,
détruisait des maisons. Ils avançaient d’environ
10 à 15 m par incursion. De
cette manière ils ont détruit environ 3'000
maisons. Actuellement il y a 400 m entre le mur et la première
rangée de maisons. Entre le mur de béton
et la frontière égyptienne on voit un espace
de 150 m dans lequel étaient stationnés les
soldats Israéliens avec leurs tanks. A l’arrivée
de la nuit, les portes du mur s’ouvraient et les incursions
commençaient.
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> voir récit
et photos 2004
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Nous avons parcouru le mur, espionné par les interstices
la frontière avec l’Egypte. Nous avions l’Egypte
à peine à quelques mètres mais en même
temps à une distance infinie.
A Rafah pendant la répression et les bombardements
700 sites industriels, des infrastructures d’eau, d’électricité,
et de téléphone ainsi que 6 mosquées
ont été détruits. Certaines installations
avaient été financées par la Communauté
Européenne.
J’ai parlé que des destructions matérielles
qui impliquent la dégradation de la qualité
de vie, à un niveau presque inhumain. Mais
il y eu des vies fauchées, seulement à Rafah
il y eu 433 morts dont 151 enfants.
Je ne trouve pas les paroles pour décrire
ce que nous avons vu, j’ai seulement honte
d’appartenir à un monde qui permet, qui cautionne
par son inaction de telles souffrances, de telles destructions
et l’enfermement de tout un peuple. Il est temps
que nous réagissions, que nous exigions
de nos gouvernements les mesures nécessaires pour
empêcher que la bantoustanisation de Gaza serve à
Israël d’alibi pour continuer une politique unilatérale
d’occupation de la Cisjordanie (principalement de la
Vallée du Jourdain et de Jérusalem). C’est
à nous de nous mobiliser pour changer le rapport de
force international. L’histoire nous a démontré
que c’est possible.
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lire le début: / enfermement /
rapport de la 17e
mission civile
organisée par le Collectif
Urgence Palestine
octobre 2005
Photos: © Nicolas Bezençon
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